L’extrême droite britannique est présente dans le paysage politique anglo-saxon depuis plusieurs décennies. Même s'ils n’ont pas connu la même déferlante que leurs homologues français, les mouvements fascistes britanniques ont ressurgi brutalement au début des années 70. Après certains succès électoraux, le principal mouvement d’extrême droite se décompose laissant la place à des groupuscules ultra violents ayant recours entre autres au terrorisme. Depuis peu, l’extrême droite anglaise tente de lisser son image et réussit une percée aux élections locales de 2006. Petit aperçu de l’histoire de l’extrême droite anglaise de 1970 à aujourd’hui.
Le National Front, symbole du retour de l’extrême droite sur la scène politique britannique est officiellement crée en 1967. Alliance de différents groupuscules fascisants, l’objectif de cette union est de fédérer l’ensemble des organisations et tendances d’extrême droite du Royaume-Uni au sein d’un parti unifié. Le National Front se positionne principalement contre l’immigration et l’asile politique en brandissant la menace de l’invasion.
Au milieu des années 70, le National Front passe à l’offensive. Profitant de la récession économique et de la politique d’austérité des travaillistes, les nationalistes revendiquent l’adoption de la préférence nationale en matière d’emploi. Présent sur les terres d’élections des travaillistes, le National Front se constitue une base parmi les jeunes des classes populaires. Il réussit à s’implanter dans certains lycées et essaye avec un certain succès de recruter dans les syndicats de postiers ou de cheminots.
Fort de sa nouvelle capacité de mobilisation, le National Front décide d’organiser des parades dans les grandes villes et de traverser les quartiers populaires pour terroriser les immigrés.
Sur le plan électoral, le NF réussit certaines percées électorales au niveau local. Lors d’une élection partielle à Deptford, au sud de Londres, les fascistes obtiennent 44 % des voix. En 1977, le National Front devient la 4e formation politique du pays.
En réaction, la riposte antifasciste s’organise. Les contre-manifestations, la présence de terrain partout où intervient le NF et la diffusion d’investigations sur la nature du mouvement porte ses fruits puisqu’en 1979, le National Front recule sur le plan électoral et ne tarde pas à se décomposer en éclatant en plusieurs groupes concurrents.
La frange la plus radicale composée principalement de skinheads se structure autour de la scène musicale RAC (Rock Against Communism). Le groupe Skrewdriver est le moteur de ce mouvement. Après un split de courte durée, Ian Stuart reconstitue le groupe en 1979, sous une forme ouvertement néonazie. Durant quelques années, skinheads néonazis et National Front agiront de concert. Avec l’aide financière du NF, est crée, en 1984, le White Noise Club. Le WNC est un réseau de groupes de rock, d’organisateurs de concerts et de militants politiques. Très rapidement des velléités d’indépendance s’expriment au sein du WNC et certains membres actifs de la scène musicale emmenés par Ian Stuart décident de fédérer les nazis-skins en dehors de la tutelle du National Front en créant l’organisation Blood and Honour (Sang et Honneur). B&H ne cache pas son admiration pour Adolf Hitler et développe un discours suprémaciste avec pour thématique centrale la guerre ethnique et le complot juif mondial. Pour le leader du groupe Skrewdriver : « La musique est le moyen idéal d’amener la jeunesse au national-socialisme. »
En 1991, une cellule terroriste gravitant autour de B&H dénommée Combat 18 pour « Combat Adolphe Hitler» émerge. Crée par Harold Covington, un néo-nazi installé aux Etats-Unis, C18 se spécialise dans les attaques contre les librairies et les militants antifascistes. L’organisation néonazie attise les haines entre communautés en agressant les populations immigrées. Ces mini pogroms seront à l’origine d’émeutes urbaines à Oldham ou Burnley.
En quelques années B&H s’exporte à l’étranger. Des cellules B&H apparaissent aux quatre coins de l’Europe et aux États-Unis. En 1993, Ian Stuart décède dans un accident de la route. B&H subit alors une guerre de succession intense. Au final, Combat 18 réussit à contrôler le mouvement et à le transformer en cache sexe de l’organisation terroriste destinée à lever des fonds. En 1997, C18 passe à l’acte en organisant une campagne de lettres piégées. Il récidive un an plus tard. Cependant, le groupe ne survivra pas aux investigations policières. Ses effectifs estimés à 500 en 1995 tournerait désormais autour de la cinquantaine d’unités.
En 1999, David Copeland, après un passage éclair dans les rang du BNP, rejoint le National Socialist Movement, scission de C18 et organise seul une série d'attentats à Londres qui coûtera la mort à trois individus.
En parallèle de cette extrême droite radicale et minoritaire, le British National Party, créé en 1982 après la scission du National Front occupe seul le créneau de l’extrême droite électorale depuis la marginalisation de ce dernier. Le parti est dirigé par Nick Griffin, qui souhaite défendre «les Blancs d'Angleterre à coups de bottes et à coups de poing». Depuis le milieu des années 90, le BNP est en phase ascendante. En moins de 10 ans ses effectifs sont passés de 1200 à près de 8000 membres. Sur le plan stratégique le BNP rompt avec l’approche extrémiste et privilégie la recherche de respectabilité. Son discours est construit autour de trois idées motrices : la lutte contre l’immigration, la préférence nationale en matière d’emploi et l’agitation de la menace islamiste. En termes électoraux, le BNP a longtemps affiché des scores anecdotiques. Ce n’est qu’en 2002 que le parti obtient des conseillers lors d’élections locales à Burnley, ville ayant connu des émeutes provoquées par l’extrême droite. En 2006, avec 48 conseillers élus pour une moyenne de 19% là où il se présentait, le BNP réussit une véritable percée électorale digne des scores réalisés par l’extrême droite continentale.